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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/176

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une martyre chrétienne allait au tigre, résolument, le camélia symbolique à la main, en guise de palme. Lorsque je m’étonnais de la voir se distribuer ainsi comme la manne, elle laissait tomber devant moi les voiles mal agrafés qui drapaient ses attraits consolateurs et elle soupirait :

— Regarde !

Et il n’y avait rien à répondre.

C’était au temps où elle s’était embéguinée de Bricolet, son copain de café-concert. Ce Bricolet n’était assurément qu’un pitre. Son « numéro » consistait à se déformer la caboche, soit en distendant, soit en contractant ses traits élastiques, et à imiter les masques japonais les plus hideux et les plus hilares, par un artifice de grimaces dont le succès était immense. Peut-être vous le rappelez-vous ? Moi, je l’aurais fait guillotiner, mais Géraldine le goba. Pourquoi les plus jolies aiment-elles les monstres ? Les fées nous le disent dans le conte de La Belle et la Bête.

Toujours est-il que son erreur coûta assez cher à la folle divette. L’affreux singe à la mode lui grugea d’abord les quelques banknotes qui lui restaient d’une liaison de demi-caractère avec un gros vivandier des Halles centrales, puis