Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/184

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que, n’étant pas Balzac, je renonce à analyser. Il ressemblait à un explorateur qui, après avoir fait le tour du monde, se borne, satisfait, au philosophique voyage autour de sa chambre et y découvre l’univers. Un soir, dans l’ivresse d’une passion sans cesse accrue, il lui déclara son intention formelle de l’épouser.

Elle le regarda, béante d’abord, et puis elle éclata de rire.

Epouser Géraldine, en justes noces, ah ! par exemple, c’était un comble ! Elle lui avait tout dit pourtant, tout avoué, sans réticence aucune. Le Niagara n’était qu’une « cascade d’enfant » en comparaison de ses cataractes !… Elle, la légitime d’un officier français plein d’avenir, qui serait un jour le général Torbier !… Du reste, le mariage était non seulement contre ses principes, mais au rebours de sa destinée terrestre. A chacun et chacune son sort et son métier et le paradis, à la fin, pour tout le monde ! Que diraient ces dames de Bordeaux et d’ailleurs ?

Il ne l’écoutait même pas.

— J’ai l’honneur de te demander ta main, réitéra-t-il, très calme. Je suis orphelin de père et de mère, libre de mes actes, et je t’aime. Pour le reste, j’ai mon épée.

Et la lutte dura huit jours, acharnée ; ils ne