Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/338

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docteur Faust de la légende, dans la floraison du rajeunissement diabolique. Haut de stature, le geste enveloppant, la tête pleine et pâle, trouée de deux yeux phosphorescents, encadrée de cheveux roux, longs et serpentueux qui lui battaient les épaules, il paraissait avoisiner la trentaine, quoique à l’état civil il l’eût dépassée déjà de vingt hivers inavoués. Mais tout son charme se dégageait de sa voix prenante, timbrée d’échos doux et mourants comme une cloche de baptême dans les bois. Or, de cette voix, le savant niait l’amour !…

Et non seulement il le niait, mais il le maudissait, le chargeait de toutes les hontes du genre humain, de tous les crimes héréditaires des empires, des républiques, des religions, des philosophies, de toute association terrestre, et il le taxait d’insulte à la nature.

— Tout le mal qu’on fait ou qui se fait dans la planète, sous la clarté alternée des deux foyers de lumière, a sa source, sa cause et son ferment en cette erreur scientifique qui défère à l’âme un besoin organique dont le corps seul a la charge. Hors de sa loi physique, ce qu’on appelle improprement l’amour, messieurs et mesdames, n’est pas, il ne saurait être, et le monde moderne se brise sur cette illusion déses-