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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/360

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« Quand le colonel eut terminé, on se prit à causer sur les rangs. Balognet essaya de couper sa botte avec sa baïonnette, tandis que l’herboriste mettait son sac en traversin sur les rebords du fossé et s’apprêtait à dormir, comme Turenne sur son canon. Le peintre parlait de tremper une soupe, mais au figuré cette fois. On discutait la harangue du colonel. Les uns la trouvaient trop laconique, les autres sans profondeur ! Un serrurier remarqua que le mot République n’y était pas prononcé et en conclut que le colonel était bonapartiste. Un vieux monsieur récita les mots de Napoléon avant Austerlitz. Quant à moi, je me bornai à remarquer qu’il valait mieux prêcher d’exemple et que, si j’avais l’honneur d’être militaire, je crierais simplement : En avant !

« Cependant la journée avançait, et la trouée n’arrivait point. Nous voyions de temps en temps accourir à bride abattue de jeunes officiers qui échangeaient quelques mots avec le colonel. Le Mont-Valérien tonnait sans discontinuer, et, sur la gauche, on entendait crépiter la fusillade. Nous attendions impatiemment le moment de nous précipiter dans la mêlée.

« On a beau dire, voyez-vous, le Français est né soldat. Ce qui me désespérait, c’était de