Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sur son indisposition. Mais elle fut suivie à bref délai par une deuxième, puis quotidiennement, par vingt autres, toujours plus aigres.

— Mes chers enfants, soupirait Bélise, votre bonheur se disloque.

Quoique Clitandre sentît venir l’orage, car il n’était point sot, et loin de là, il n’en perdait pas une bouchée. L’aîné était sûr du cadet, et plus encore le brun du blond. « Il ne me flanquera pas à la porte peut-être, se disait-il, et, d’ailleurs, reste la belle-mère. » Quel rêve satanique berçait-il dans cette idée de derrière la tête, c’est ce que vous saurez tout à l’heure.

Le dimanche suivant, les cloches sonnaient la fête patronale d’Araminte. On devait la festoyer par un dîner fleuri, suivi d’une réception en vue de laquelle Clitandre se mit en frais de poésie. Il pinçait de l’acrostiche. Mais le potage annoncé, Araminte refusa de s’asseoir à table, et cela sans excuses ou prétextes, délibérément, dans l’expression d’une volonté immuable. Elle voulait en finir, et ce soir-là, par une esclandre.

— Puisque nous sommes à l’auberge, faites-moi servir dans ma chambre, dit-elle à son mari.

Et, précisant la situation, elle le somma de choisir entre « son frère et sa femme ».