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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/82

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si doux à tous, « plus enfant qu’elle », disait la mère, et à qui elle faisait ses additions, le soir, après dîner, sur la table.

Quant à Mme Égarot, il l’avait rassurée en ces termes : « Ne crains rien, je ferai mon temps et, dans trois ans, je serai là-bas, avec vous deux pour toujours. Courage, à bientôt. »

Or, il fit son temps, en effet, sans en dérober une heure à la justice de son pays, et quand la liberté lui fut rendue, il ne devait plus rien à personne, sinon le centuplage des fonds hasardés sur son crédit, ou, si l’on veut, le manque à gagner desdits fonds, déjà confiés, du reste, à d’autres agioteurs.

Loys Égarot avait dit la stricte vérité au tribunal, il ne savait pas calculer, et personne n’aurait pu se vanter, sans mentir, de l’avoir vu à la corbeille. Mais il était marqué d’un signe terrible et doué, de toute éternité, d’une vertu d’attraction inouïe et fabuleuse. Il inspirait confiance, irrésistiblement. Dieu l’avait créé charmeur de gogos. Il suffisait qu’il parût quelque part et n’importe où, pour que les hommes tinssent à lui remettre leurs écus, les femmes leurs diamants et les enfants leurs billes ; et il ne pouvait pas ne pas les prendre, on l’aurait suivi jusque dans la mer, comme les