Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/122

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qu’il n’y a qu’à copier sincèrement pour atteindre le Beau. Il faut donc croire que les artistes procédaient alors par mode d’éclectisme et poursuivaient sur les modèles un idéal de vérité dont la Renaissance leur mesurait la vie et leur imposait la tradition. Nous avions à ce sujet de longues discussions dans l’atelier de Léon Glaize, qui était le plus fort peintre du groupe et en qui nous saluions tous l’autorité d’un praticien impeccable et d’un docte théoricien.


Le propriétaire de cette villa d’artistes était lui-même un peintre de haut renom, Auguste Glaize, que l’on appelait Glaize le Vieux, à la façon italienne, pour le distinguer de Léon Glaize, son fils, qui l’a suivi dans la carrière.

Glaize le Vieux était un romantique. À « Hernani », il avait combattu sous le pennon des deux Devéria, ses maîtres. En ces temps héroïques, et qui semblent préadamites, on se réclamait d’un maître et l’on apprenait son art comme un métier, ce qui, paraît-il, est parfaitement inutile et encore plus ridicule. Moi, je veux bien, si ça vous amuse. Il est vrai que lorsque je me retourne pour voir et savoir quels sont ceux, dans les arts, qui, ayant vécu, durent encore, quoique trépassés, seuls les bons techniciens me semblent avoir ce privilège. Et quasi cursores !

— Vois-tu, me disait un jour Félix Bracquemond, l’aquafortiste, en sortant d’une exposition où je l’avais rencontré, il n’y a plus que des génies. Ce qui devient rare, c’est le talent.

En 1830, Glaize le Vieux, qui avait déjà ses vingt-trois ans (l’âge de la médaille d’honneur aujourd’hui)