Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lagée où l’ex-jet d’eau dressait sa pointe sans naïades. Puis, on allait fatiguer le temps sur les billards.

L’ère des balthazars close, on revenait, sans soucis d’ailleurs, aux nourritures sommaires et expéditives du jeûne lyrique. Je savais faire la fondue au fromage, et j’ose dire même que j’y excellais. Mais Zizi n’avait reçu aucune instruction culinaire et son attitude devant une casserole ou un poêlon était celle des brochets devant une pomme. Il s’en allait.

Je me rappelle qu’un jour, ayant résolu de m’attaquer au problème du bifteck aux pommes, je l’envoyai chez un maître boucher, riche en viandes diverses, se nantir de l’élément fondamental de l’équation gastronomique. Il revint avec une pièce qui me parut être, en effet, propre à la recherche. J’avais allumé un brasier sur la pelouse et nous pelions tous deux les patates, « comme les Natchez », disait-il, lorsqu’une voiture s’arrêta à la porte, dans la rue de Villiers, rue de banlieue fort déserte où il ne passait guère que des charrettes de maraîchers.

Comme il n’y avait aucune sonnette au pavillon, il était assez difficile de se faire ouvrir, et, généralement, pour ne pas me déranger, les amis enjambaient à même par-dessus la muraille du jardin. Mais, cette fois, Bistu, qui ne reconnaissait aucun d’eux, se prit à aboyer en cerbère.

— Ne bouge pas, me dit Georges, c’en est peut-être un !…

Car il en voyait partout, hélas ! Et se hissant au ras du mur, entre les pariétaires, il me jeta :

— C’est une femme !… Chouette !

Et je courus ouvrir.

Très élégante, finement parfumée et gantée, la