Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/300

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miste. Non seulement le gaz ne ronge pas, selon lui, les peintures, mais encore il les embaume !

Un autre malheur, plus grave celui-là, menace Baudry dans sa renommée et dans l’avenir de son œuvre. L’un de ses chefs-d’œuvre, et l’un des ouvrages auxquels il tient lui-même le plus, appartient à une personne qui en interdit obstinément la vue à tout visiteur. C’est son droit, sans doute, car le plafond a été payé à l’artiste. Mais cette personne nourrit, dit-on, le projet digne d’elle de détruire à sa mort tous les objets témoins de sa vie opulente, et d’engloutir avec elle, dans le néant et l’oubli, ses richesses[1]. Baudry est averti de cette résolution orientale, et il ne ressent aucun enthousiasme pour elle, attendu que sa décoration est comprise dans l’holocauste babylonien. Son intention bien arrêtée est de parer aux coups en reproduisant l’ouvrage. On lui objecte qu’il n’en a pas le droit. Cela est fort possible, mais il ne manque à la gloire de l’artiste que de perdre un pareil procès.

(1878)
(Galerie Contemporaine.)
  1. La décoration dont il est ici question est celle de l’hôtel Païva, aux Champs-Élysées. Elle a, grâce à Dieu, échappé au rêve néronien de la terrible hétaïre.
    É. B.