Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/263

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dont je vous parle, je mis la main sur une lettre extraordinaire, et que vous allez d’ailleurs lire. Le Voltaire qui en eut la primeur n’a peut-être pas beaucoup de collectionneurs et si l’aimable et charmant poète d’Auriac n’avait fini par le dénicher dans les poudres de la Bibliothèque Nationale, le chef-d’œuvre serait probablement perdu, comme la moitié de l’œuvre d’Eschyle.

Vous rappelez-vous, dans les Odes Funambulesques le quatrain si drôle de Théodore de Banville ?

Les demoiselles, chez Ozy
xxxxxxxxxMenées,
Ne doivent plus songer aux hy-
xxxxxxxxxMénées.

Et le poète, dans son commentaire, explique que cette Ozy s’appelait Alice et qu’elle avait été « l’amie » de tous les hommes d’esprit de son temps. Elle s’était, après fortune gagnée, retirée du théâtre au lac d’Enghien et elle y rendait le pain bénit dans la paroisse. J’ai consacré moi-même à cette créature du bon dieu un chapitre de mon premier volume de Souvenirs. — Or, la lettre est d’elle.

Comme il ressort de sa teneur même, elle date de la dernière quinzaine de mai 1853 et suivit de quelques jours la représentation des Filles de Marbre de Théodore Barrière et Lambert Thiboust, pièce assez oubliée, qui était une réplique à La Dame aux Camélias. On n’en était encore en ces temps d’innocence qu’à disputer sur le vieux lieu commun de la courtisane, seule femme libre connue et reconnue par nos pères, et si Alexandre Dumas fils voulait la racheter au diable par l’amour, ses contradicteurs