Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/143

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On joue quelquefois Don Juan quand on ne sait plus où donner de la tête. Si Mozart revenait au monde, il dirait peut-être, comme ce président dont parle Molière, qu’il ne veut pas qu’on le joue. Spontini, au contraire, a voulu être joué, et il l’a été. On ne veut pas entendre parler, à l’Opéra, de reprendre ses anciens chefs-d’œuvre. Ambroise Thomas, Morel et moi, nous disions l’autre jour que nous donnerions bien cinq cents francs pour une bonne représentation de la Vestale. Comme nous savons cette partition par cœur, nous l’avons chantée jusqu’à minuit ; tu manquais pour l’accompagner.

La cause de Spontini a été défendue dans une brochure par un de nos amis, Émile D… ; quelques journaux se sont joints à lui. Cette cause allait être gagnée, quand Spontini a cru devoir publier une lettre, déjà imprimée, il y a deux ou trois ans à Berlin, sur la musique et les musiciens modernes[1]. Les adversaires de Spontini eussent payé mille écus pour la publication de cette lettre, il la leur a donnée pour rien. Ça n’empêche pas la Vestale d’être un chef-d’œuvre, mais cela fait que nous ne le reverrons jamais…

Tu as vu que la place de professeur de composition laissée vacante par la mort de Paër allait être donnée à M. Carafa. On assure que mon système sur l’indifférence commence à être apprécié au ministère. Les orangers du Jardin Musard portent déjà des fruits ; Théophile de Ferrière a été assassiné

  1. Cette brochure, adressée par Spontini aux membres de la Chambre des députés, fut discutée en séance publique. M. Monnier de la Sizeranne en soutint les conclusions, qui furent rejetées après un discours de M. Taschereau.