Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/299

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ma faute si je ne suis pas riche, si je n’ai pas de quoi te faire vivre tranquille, en oisif, à Paris avec ta femme, ton enfant ou tes enfants, si tu en as d’autres ?… Y a-t-il l’ombre de justice à me reprocher cela ? Tu m’as écrit au milieu d’août à Bade ; depuis lors, pas un mot ; tu m’as laissé deux mois et demi sans savoir ce que tu étais devenu ; Alexis n’en savait pas davantage. À présent tu m’écris avec des expressions d’ironie… Ah ! pauvre cher Louis, ce n’est pas bien.

Ne t’inquiète pas de ce que tu dois à ton tailleur ; le billet sera payé quand on me le présentera. Si tu veux que je te débarrasse plus tôt de cette dette, envoie-moi l’adresse du tailleur et j’irai l’acquitter. Il est vrai que je te croyais plus jeune ; ne vas-tu pas me faire un crime aussi de ne pas avoir la mémoire des dates ? Est-ce que je sais quel âge avaient mon père, ma mère, mes sœurs, mon frère, quand ils sont morts ; faut-il en conclure que je ne les aimais pas ?… Ah ! vraiment… mais j’ai l’air de me justifier. Oui, je le répète, le chagrin te fait délirer, et voilà pourquoi je ne puis que t’aimer et te plaindre davantage. Tu me parles de solliciter pour toi, mais qui ? et pour obtenir quoi ? Tu sais bien qu’il n’y a personne de plus maladroit que moi en sollicitations. Dis-moi clairement ce que je puis faire et je le ferai. Je n’ai pas reçu de lettre de Morel.

Que pourrait-il me dire ?

Adieu, cher ami, cher fils, cher malheureux par ta faute et non par la mienne.

Je t’embrasse de tout mon cœur et j’attends de tes nouvelles par le prochain courrier.