Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/51

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de renier les anciens, il se prosternait avec vénération devant les dieux de la symphonie, il brûlait devant leurs autels l’encens le plus pur. Son unique prétention (et elle nous paraît justifiée) était de continuer la tradition musicale en l’agrandissant, en l’améliorant, grâce aux ressources modernes : « J’ai pris la musique où Beethoven l’a laissée », disait-il avec quelque orgueil à M. Fétis. — Il y avait du vrai dans cette assertion.

Dès 1835, les journaux annoncèrent que Berlioz s’occupait d’écrire un opéra sur un livret d’Alfred de Vigny ; il s’agissait de Benvenuto sans doute, qui ne parut sur la scène que trois ans plus tard. En France, tout compositeur qui n’aborde pas le théâtre est condamné à l’obscurité ; Berlioz se rendait bien compte de cet axiome et cherchait à se produire dans la musique dramatique. Un instant, il obtint le poste de directeur des Italiens[1] ; mais la presse opposante cria au favoritisme et répandit le bruit que M. Bertin, des Débats, avait fait obtenir à son feuilletoniste le sceptre directorial, pour que mademoiselle Louise Bertin, qui composait, elle aussi, fît jouer, salle Ventadour, les ouvrages qu’on lui refusait ailleurs. Devant cette malveillance caractérisée, Berlioz se retira ; il n’avait pas trop à se plaindre du Gouvernement qui lui commandait tantôt un Requiem, tantôt une Marche funèbre et triomphale, toutes les fois qu’il était question de célébrer les victimes de Juillet.

Le Requiem fut exécuté dans diverses villes de France, notamment à Lille, d’où Habeneck envoya à l’auteur une lettre de félicitation[2]. Mais ce n’étaient là que des succès relatifs. La grosse partie allait se jouer à l’Opéra, où les études de Benvenuto Cellini étaient poussées avec activité.

  1. Gazette musicale, année 1838, p. 242.
  2. Ibid., p. 275.