Page:Bernède - La Ville aux illusions, 1936.djvu/105

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— Bah ! il ne faut pas vous désoler, fit-elle gentiment. Ou gagne très bien sa vie sans avoir tous ces diplômes, vous savez !

— Je la gagne…

— Bien ?

Il eut un sourire amer :

— Cinq cents francs par mois ! Pas même ce que vous recevez, vous !

Elle baissa la tête, tandis que ses yeux se remplissaient de larmes.

— Vous pouvez parler au passé, murmura-t-elle. Je ne suis plus employée chez Corbin.

— Comment ? Vous avez perdu votre place ?

Elle hocha affirmativement la tête. L’émotion l’empêchait de parler.

— Voyons, ma petite Marcelle ! s’écria l’ancien étudiant en se rapprochant d’elle, tout ému par ce chagrin. Il ne faut pas pleurer… Vous retrouverez une autre place…

— Vous savez, c’est si difficile ! sanglota-t-elle. J’ai couru depuis que je suis sortie de l’hôpital…

— Je sais que c’est difficile ! fit-il, pensant aux démarches pénibles qu’il avait effectuées lui-même. Mais pourquoi ne vous a-t-on pas gardée ?

— Ils ont prétendu que je suis restée trop longtemps absente. Bref, quand j’ai voulu retourner, j’ai trouvé la place prise et on m’a dit tout simplement qu’on n’avait plus besoin de moi.

— C’est monstrueux ! c’est lâche ! s’exclama le jeune homme. On ne met pas quelqu’un à la porte pendant qu’il est malade !

— C’est cependant ce qui est arrivé. Pensez, quel coup pour moi ! Je me suis brouillée complètement avec mes cousins, car ils ont eu grand peur que je revienne sur ma décision de vivre seule et que je tombe à leur charge… J’aurais préféré aller mendier, sur la route ! s’écria-t-elle violemment.

— Je vous comprends !

— On m’a donné cent francs de gratification… Mais j’ai eu des frais et j’ai beau économiser, je vois