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LA VILLE AUX ILLUSIONS

Les jeunes gens échangèrent un rapide regard. Puis elle se mit à tricoter, tandis que lui, les yeux au plafond, cherchait à oublier les heures moroses.

Il y avait près d’un quart d’heure qu’ils étaient ainsi lorsque tout à coup, le peloton roula tout auprès de Jean. Une exclamation l’arracha à sa rêverie. Il comprit ce qui se passait. Il se baissa et ramassa l’objet qu’il tendit à sa voisine.

Il osa alors la regarder un peu mieux. Et soudain, il eut la sensation très nette qu’il avait déjà vu ce visage-là quelque part…

— Merci, monsieur ! répondit-elle, d’une voix fraîche et musicale.

À l’hôpital, on lie vite connaissance. La glace était rompue. Ils bavardèrent.

— Vous étiez malade, mademoiselle ? interrogea l’étudiant.

Elle secoua la tête.

— Non… Un accident bête… Je me suis fait renverser par une auto, l’autre jour, et j’ai été assez gravement blessée à la cuisse et à l’épaule. Mais maintenant, je commence à aller mieux.

— Vous pouvez vous servir de votre bras ?

— Oui, c’est surtout au-dessus du genou que j’ai été atteinte, Et vous ?

— Fièvre typhoïde…

— Oh ! c’est très grave, savez-vous ? On peut en mourir !

— On me l’a dit… Mais, ajouta-t-il en riant, vous voyez que j’en réchapperai encore cette fois ?

— Quelle en est la cause ? Vous a-t-on dit ?

Il haussa les épaules.

— Vous savez ! On ne sait trop l’origine exacte des maladies. Trop de fatigue, sans doute… Du surmenage…

Elle soupira.

— Je connais ça !

— Vous travaillez à Paris ? questionna-t-il.

— Oui, je suis secrétaire dactylo aux usines Corbin et Levasseur, 13, rue de la Chaussée d’Antin…