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DES JÉSUITES

le texte, témoignages également anonymes, il est vrai, pour la plupart, mais néanmoins bien caractéristiques, car ils s’accordaient tous à déclarer que, nonobstant l’approbation et les bulles des papes, la Compagnie de Jésus était une damnable institution.

Voilà qui faisait pièce !

Quelque grotesque et folle que fût l’invention, en dépit des incohérences grossières, des contradictions flagrantes et des criantes méprises, l’ouvrage, dans un certain milieu, fit rumeur. Des copies manuscrites avaient d’abord circulé sous le manteau[1] ; maintenant c’était l’édition imprimée qui pénétrait partout. Enchantés, luthériens et calvinistes s’emparaient de la trouvaille, si bien que l’auteur lui-même, enhardi par le succès et couvert par un haut personnage, sans doute le duc Georges Zbaraski, proférait obscurément de nouvelles menaces[2].

Il était temps d’intervenir. Aussi l’autorité

  1. Gretser, Confra famosum libellum…, libri tres apologetici, dans les Op. omnia, t. XI, p. 990 C. Dans ce passage il ne s’agit aucunement, comme l’avait conjecturé le P. Sommervogel, Précis histor., 1890, p. 86, de lettres anonymes.
  2. Plusieurs historiens, pour établir que les Monita avaient joui dès le début d’une vogue particulière, ont cru pouvoir s’appuyer sur le choix de l’expression : libellum famosum, employée par Gretser dans le titre de son Apologie et, avant lui, par l’évêque Pierre Tylicki dans ses décrets de procédure. Étrange erreur. Faut-il rappeler que famosus garde ici le sens, non pas de fameux, mais de diffamatoire, et que l’expression famosus libellus, déjà employée par Tacite, Ann. I, 72, et par Suétone, Aug, 55, est le terme classique pour désigner un pamphlet, comme dans le titre 10 du Digeste, e. 16 : De injuriis et libellis famosis.