Page:Bernard - Brutus.djvu/49

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Mon pere cependant de vos vertus charmé,
Preſt à trahir l’eſpoir dont il eſt animé,
Sans luy promettre rien le laiſſe encor pretendre,
Et veut dés aujourd’huy, vous recevoir pour gendre.
En vous cachant à tous comme à Tiberinus,
En l’occupant ailleurs…

TITUS.

En l’occupant ailleursNon, je n’écoute plus,
Je ne veux point ſçavoir ſi je pourrois encore
Ravir à mon Rival un objet que j’adore ;
En vain vous m’en offrez les moyens dangereux ;
Je veux voir l’Eſperance interdite à mes vœux,
Et quoyque par ce coup ma mort ſoit infaillible,
Je veux voir deſormais mon bon-heur impoſſible.
Peut-eſtre qu’à la fin vos funeſtes apas
Engageroient mon cœur dans de honteux combats.
Je vous ſuis pour jamais.

AQUILIE.

Je vous ſuis pour jamaisHa Ciel ! qu’allez-vous faire ?
Allez-vous à la fois me perdre avec mon pere ?
Malgré tous vos ſermens, & malgré vôtre amour,
Chargé de mon ſecret, l’allez-vous mettre au jour ?
Qui l’eut crû qu’Aquilie à ce point fût à plaindre ?
Et même que Titus euſt pû la faire craindre ?

TITUS.

Que vous répondre, helas ! dans le trouble où je ſuis ?
Sçais-je ce que je fais ? Madame, je vous fuis.

AQUILIE.

Arreſtez, ou donnez la mort à vôtre Amante.
Qui peut vous retenir ? & qui vous épouvante ?
Quoy vous deliberez ? & vous m’allez trahir ?
Ô Pere infortuné que tu me dois haïr !
Pourquoy t’ay-je aſſuré dans mon erreur fatale,
Que l’ardeur de Titus à ma tendreſſe égale