Page:Bernard - Brutus.djvu/50

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Ne me laiſſoit plus craindre un triſte évenement ?

TITUS.

Il ne connoît que trop, & vous, & vôtre Amant.
Vous m’avez fait riſquer un ſerment temeraire ;
Criminel à parler, criminel à me taire,
De crimes aujourd’huy je n’ay plus que le choix ;
Mais quoy ! je ne l’ay point, l’Amour me fait des loix.
Titus ne peut peut parler, diſſipez vos allarmes.
Mais aprés le forfait que luy coûtent vos charmes,
Si par quelque moyen qu’il n’oſe ſouhaiter,
La conjuration peut d’ailleurs éclater,
Il ſera plus ardent à venger ſa Patrie,
Que ſi par ſon ſilence il ne l’euſt point trahie,
Et contre les Tarquins justement animé,
Il ſe juſtifira d’avoir trop bien aimé.

AQUILIE.

Et cependant, Seigneur, quel deſtin dois-je attendre ?
D’être à Tiberinus, qui pourra me deffendre ?

TITUS.

Hé bien, que vous importe ? il va ſe faire aimer,
Vous ſacrifiant Rome, il ſçaura vous charmer.
Car enfin, ce n’eſt plus l’Amour qui vous inſpire,
À ſervir les Tarquins tout vôtre cœur aſpire.

AQUILIE.

Pourſuivez, pourſuivez, achevez de m’aigrir.
J’aime cette injuſtice ; elle peut me guerir.
Joignez à vos refus le mépris, & l’injure ;
De mon reſſentiment je n’étois pas bien ſeure,