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du raisonnement expérimental.

des idées préconçues, on ferait de mauvaises observations et l’on serait exposé à prendre les conceptions de son esprit pour la réalité.

Les idées expérimentales ne sont point innées. Elles ne surgissent point spontanément, il leur faut une occasion ou un excitant extérieur, comme cela a lieu dans toutes les fonctions physiologiques. Pour avoir une première idée des choses, il faut voir ces choses ; pour avoir une idée sur un phénomène de la nature, il faut d’abord l’observer. L’esprit de l’homme ne peut concevoir un effet sans cause, de telle sorte que la vue d’un phénomène éveille toujours en lui une idée de causalité. Toute la connaissance humaine se borne à remonter des effets observés à leur cause. À la suite d’une observation, une idée relative à la cause du phénomène observé se présente à l’esprit ; puis on introduit cette idée anticipée dans un raisonnement en vertu duquel on fait des expériences pour la contrôler.

Les idées expérimentales, comme nous le verrons plus tard, peuvent naître soit à propos d’un fait observé par hasard, soit à la suite d’une tentative expérimentale, soit comme corollaires d’une théorie admise. Ce qu’il faut seulement noter pour le moment, c’est que l’idée expérimentale n’est point arbitraire ni purement imaginaire ; elle doit avoir toujours un point d’appui dans la réalité observée, c’est-à-dire dans la nature. L’hypothèse expérimentale, en un mot, doit toujours être fondée sur une observation antérieure. Une autre condition essentielle de l’hypothèse, c’est qu’elle soit aussi probable que possible et qu’elle soit vérifiable ex-