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V


C’est la grande Terrasse, un soir d’août. Le Château-Frontenac étincelle à chacune de ses fenêtres, et l’on voit se profiler, en quelques-unes d’elles, la silhouette silencieuse de femmes qui paraissent enveloppées d’une auréole. Au café, près des verdures tendres, et sous un plafond verni que la lumière paillette de reflets un peu sombres, la foule des jouisseurs cause, déguste ou flâne autour des tables mignonnes : le thé fume dans les bols minces et la glace fond dans les liqueurs fines. Les habits noirs taillés des hommes du service attendent qu’on les appelle ou s’empressent. Les frêles abats-jour des bougies répandent une sensation vague de bien-être, et à regarder leurs feux roses épars, on a je ne sais quelle illusion de bonheur. On a vidé les écrins : les perles ouvrent leurs yeux vifs dans la soie légère et dans les chevelures nouvelles. Des bouquets parfument les corsages, et les galants portent, à leur boutonnière, une fleur dont