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au large de l’écueil

potiches à fleurs ordonnèrent aux œillets d’exhaler leurs plus doux parfums ; la vieille horloge songea à précipiter les minutes ; la lampe ancienne promit d’être exquise le soir. Les yeux de Lafontaine et Cartier brillèrent dans leurs orbites de plâtre. Philo, un grand Terreneuve, daigna faire luire, dans son regard de philosophe, une émotion assez vive.

Depuis un quart-d’heure, le « Laurentic » était immobile au long quai de pierre. Le sang frappait avec violence aux tempes de Jeanne et de sa mère, silencieuses. D’un instant à l’autre, Jules et son père seraient là. Soudain, elles furent debout. Elles crurent que leur cœur allait éclater. Une voiture s’arrêtait. Trop émues, elles ne bougèrent pas. La sonnerie électrique vibra dans tout leur être. Des pas se hâtèrent dans l’escalier tournant. Et Jules tint longuement sur la sienne les deux poitrines haletantes.

— Mon Jules ! divaguait presque la mère. On dirait que tu as grandi !… Que je suis heureuse !… Es-tu fatigué ?… Dis que tu es content de nous revenir !…

— Oh ! ma mère ! que c’est bon, te regarder, te parler ! Comment ai-je pu rester si longtemps