Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/145

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ne se mêle à l’émotion poignante ; elle ne consent à rêver de l’amour que bonté, que noble extase. Plus claire et plus impérieuse devient, aux sources les plus vivantes de l’être, l’attente d’une joie dont on meurt quand elle s’éloigne après être venue…

Devant le désespoir de sa mère, est-elle généreuse de s’attendrir sur elle-même, de se complaire en la vision du bonheur que lui prépare l’avenir ? Un remords la pique au vif : une seconde, le grand chagrin de Germaine l’affole au point que des spasmes de douleur l’étreignent au cerveau. Ces plaintes, ces mots éperdus, il lui semble qu’elle-même les profère, qu’ils sont le sang filtrant d’une blessure qui la tue elle-même. Autant pour guérir sa mère que pour se calmer elle-même, Lucile, une énergie mystérieuse la refaisant brave, incline sa chevelure un peu désordonné, enlace d’un bras solide le cou de Germaine, verse à flots caressants la paix et la foi.

— C’est assez, maman, tu te brises. Tu m’avais promis ! Sois donc courageuse ! Regarde-moi : n’en ai-je pas, du courage ? Avant longtemps, je n’en aurai plus, si tu continues. Je l’ai entendu dire : le désespoir, ça ne peut pas durer ; c’est comme les gros orages… Je t’emmène, laisse-toi faire. Ton visage brûle, tes mains ont le fris-