Page:Bernier - Ce que disait la flamme, 1913.djvu/147

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L’étreinte du bras se dénoue, amollie. Jusqu’alors, la promesse de Jean Fontaine est demeurée intégrale en la mémoire de Lucile : aucun doute ne l’avait même effleurée. Elle s’est souvenue de l’accueil sans morgue, du sourire, de l’accent, de la pitié du jeune homme comme de choses très bonnes et qui ne pouvaient l’avoir déçue. La scène entre elle et lui revint souvent, tous les jours, hanter son esprit d’images auxquelles celui-ci découvrait un charme inéprouvé, dont la douceur pénétrait. Plus elles furent assidues en elle et s’y creusèrent, plus s’aviva l’impatience de revoir Jean. Il semblait qu’il apporterait avec lui quelque chose d’indéfinissable qui, promptement, magnifiquement, délivrerait son père. Puisque sa bonté seule ensoleillait d’espérance, il devait avoir une science toute-puissante. Ce retard, en quelque sorte, l’auréolait aux yeux de Lucile : elle se sentait toujours plus infime devant lui comme devant un être radieux et supérieur. Et n’est-ce pas à la confiance en lui, impérieuse, qu’elle est beaucoup redevable d’une telle conviction ?

Mais que les nerfs soient las d’être tendus ou que le prestige du jeune médecin tout à coup pâlisse, tant de suggestion vient de faiblir. La crainte envahit Lucile. Elle raisonne, elle commence à ne plus croire. S’il allait ne pas venir ?