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CE QUE DISAIT LA FLAMME…

Il a pitié de son angoisse intime et tâche de l’en délivrer.

— Avez-vous confiance en moi ? lui suggère-t-il, familièrement, avec un sourire.

— « Beaucoup plus en vous qu’en moi-même », dit-elle, d’un élan spontané, un éclair vif sillonnant son regard, mais confuse aussitôt d’avoir été si primesautière. Jean sourit davantage. Elle a l’intuition qu’il ne condamne pas sa hardiesse et qu’il accueillera son message avec bienveillance

D’un ton plus alerte, elle reprend :

— Mon père est François Bertrand, l’un des ouvriers de M. Fontaine. Il devait se remettre à l’ouvrage demain. Depuis une semaine, il était presque revenu à la santé. Hier seulement, il est retombé malade. Le docteur a dit que c’est la rechute…

— De quoi souffre-t-il ? interrompit le jeune médecin, intéressé.

— Des fièvres, Monsieur, répond Lucile, machinale, un désappointement répandu sur ses traits assombris. L’émotion, bien qu’indéfinissable, a été soudaine et pénétrante. Eh quoi ! il ignorait que son père avait été si malade, pendant plusieurs semaines ! La mort effroyable avait pu menacer l’un des ouvriers sans que le patron eût jugé convenable de s’en inquiéter