Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/221

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SUR LA MORT MERE FEU ROY HENRY 3

Que n’est ma voix semblable à celle d’un tonnerre
Qui parlant fait trembler tout le rond de la terre,
Ou bien à ceste trompe effroyable aux mortels
Dont le son penetrant és funebres hostels
De ceux que le trespas logera dans la cendre,
Se doit faire en sursaut aux morts mesmes entendre,
Quand nostre Dieu seant pour juger l’univers
Ranimera la pouldre et les restes des vers !
Je courrois maintenant dessus quelque montagne
Qui verroit d’un costé l’Italie et l’Espagne,
Et de l’autre les champs alemans et françois,
Et plus loin l’Angleterre et le sceptre escoçois :
Puis d’une voix d’airain qui frapperoit les pôles,
Aux peuples estonnez je crierois ces paroles.
Peuples, ceste princesse à qui depuis trente ans
Mille flots de malheur la France tourmentans
Ont servy de tesmoins en l’honneur qu’on luy donne
D’avoir forcé l’orage et sauvé la couronne :
Cet astre florentin par tout resplendissant,
Qu’un grand astre royal unit à son croissant,
Et dont les feux conjoints par les feux d’hymenee,
À trois de nos soleils la naissance ont donnee :
Cet illustre ornement du sang de Medicis,
Qui rendoit de son los les plus clairs obscurcis :
Ceste royne immortelle, autant que la memoire
Peut rendre un nom vivant par l’ame de la gloire,
Femme du plus grand roy, mere des plus grands rois,
Dont le genoüil flechisse à l’honneur de la croix,
Ô peuples, elle est morte, et semble qu’avec elle
Soit morte en mesme lict la paix universelle,