Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/237

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Qu’on croit avoir forgé sur la tienne de fer
Ce traistre assassinat des marteaux de l’enfer :
Et de qui les conseils armans celle des princes
Du glaive ambitieux qui destruit les provinces
Ainsi qu’une furie attachee à leur flanc,
Font ce siecle de fer estre un siecle de sang.
Ah ! Combien je prevoy que nostre renommee
Sen verra desormais justement diffamee !
Helas ! Si par l’arrest des destins rigoureux
Ce meurtre estoit fatal à nos ans malheureux,
Que ne s’est-il commis par les mains d’un tartare,
Ou d’un que l’ocean de nos terres separe ?
Faut-il que d’un françois la traistre cruauté
En ait barbarement cet âge ensanglanté ?
Soüillant d’un tel diffame és provinces estranges
Nostre nom devestu de ses vieilles loüanges,
Qu’au lieu qu’il souloit estre un surnom glorieux,
Il soit pris maintenant pour titre injurieux :
Et qu’appeller françois un qui doit sa naissance
À d’autres regions qu’à celles de la France,
Ce soit le surnommer un traistre, un fausse-foy,
Un mutin, un rebelle, un meurtrier de son roy ?
Ha ! Je veux desormais, d’un honneste mensonge,
Me vanter d’estre né sur les mers où se plonge
Le grand char du soleil las d’avoir trop couru,
Loin des champs de la France, és rives du Peru :
Ou de ceste autre terre encor plus esloignee
À qui la loy de Christ fut naguiere enseignee.
Car je me hay moy-mesme, et hay mon jour natal,
De me sentir extraict d’un peuple si brutal,
Qui dressant des autels et des temples au vice,
Immole son roy-mesme (horrible sacrifice)
Aux cruelles fureurs qu’il evoque d’enfer,
Puis comme d’un bel œuvre en ose triompher :