Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/536

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Et ce fruict qui de Perse à tiré sa naissance,
Venimeux en sa terre, et non salubre en France.
Peu de temps s’arresta dans de si tristes lieux
L’ange appris à joüir de la gloire des cieux :
Mais bien-tost detestant cet air gros et malade,
En moins de temps qu’il peut finit son ambassade :
Puis revolant au ciel, la meurtriere esloigna,
Dont encores l’horreur si loing l’accompagna,
Qu’il eust pally d’effroy de s’estre approché d’elle,
S’il ne se fust senty d’une essence eternelle.
Cependant le troupeau des immortelles sœurs
Qui de tout vice humain purgent leurs possesseurs,
S’estant guidé par l’air sur l’aille d’une nuë,
Rendit Fontaine-Bleau sensible à sa venuë.
Le pompeux échauffaut pour cet acte eslevé,
Trembla dessous ses pieds, dés qu’il fut arrivé :
Les antiques parois du royal edifice,
La masse du portail, son arc, son frontispice,
D’un lustre plus riant semblerent esclairer,
Et ceste bande saincte en entrant adorer.
Elles se confondant d’un meslange invisible
À la troupe des grands, qu’un murmure paisible
Suivoit en ce convoy leurs vertus benissant,
Servirent avec eux ce bel astre naissant,
Dont les nouveaux rayons s’épandans sur la France
L’alloient remplir des fleurs d’une neuve esperance
Et puis quand les deux noms du ciel favorisez
Furent heureusement sur sa teste imposez,
Toutes l’environnant d’une couronne espesse,
Sous la visible forme ou de quelque princesse,
Ou de quelque grand prince à l’entour espandu,
Rendirent à son nom l’honneur justement deu ;
Chacune l’animant à suivre pour escorte
Le doux soin de celuy qu’aux humains elle apporte.
Puisses-tu (disoit l’une en baisant ses beaux yeux)
Ô grand prince estre un jour si bien voulu des cieux
Qu’encor qu’Auguste cede à l’heur de ta jeunesse,
Ton heur cede pourtant au bien de ta sagesse,