Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/144

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ignorance, se croit un savant du premier ordre. On pourrait définir son écrit : « Pot-pourri ou Recueil d’invectives ineptes contre la religion. »

La menace se mêle à l’injure :

« S’il n’est pas chrétien, qu’il ne s’avise pas de le dire ; il pourrait bien se faire chasser par le peuple à coups de pierre. »

D’Alembert n’était pas chrétien, on ne peut le nier ; mais, pour le lapider sans crime, il fallait attendre une condamnation ; le supplice sans cela n’aurait pas été régulier.

D’autres, plus modérés, se contentaient de dédaigner son talent littéraire. Dans un pamphlet signalé par Bachaumont on déclare que chez lui la vérité se montre sans beauté et l’erreur se cache sans finesse. Il veut être le singe de Pascal, il n’est qu’un Pasquin. Bachaumont ajoute : « Et cela est vrai ».

Le nom de l’auteur désintéressé était connu de tous. La mort de Clairaut laissa vacante à l’Académie des sciences une des places de pensionnaire. D’Alembert, membre de l’Académie depuis vingt-deux ans et depuis dix ans déjà pensionnaire surnuméraire, ne touchait qu’une partie de la pension. Il avait tous les droits à remplacer Clairaut ; l’usage le désignait, son mérite l’imposait, et l’Académie, par un vote unanime, le présentait au choix du roi.

L’accueil fait au directeur de l’Académie fut très froid. Le ministre, sans refuser, répondit : « Nous ne sommes pas contents de M. d’Alembert ». On laissa la pension disponible, et l’un des membres de l’Aca-