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 Gourat à ses voisins veut démontrer que riche
Peut, parfois, s’accorder et rimer avec chiche.
De peur qu’on ne le puisse aisément réfuter,
Lui-même, m’a-t-on dit, se plaît à raconter
À quel nombre de tours, de ruses, de finesses,
Il sait avoir recours, pour croître ses richesses.
 Aliboron ne voit, ne connaît que l’argent
De bon, de précieux, d’estimable, de grand :
Les lettres, les beaux arts, les talens, le génie,
Ne sont rien, à ses yeux, que fadaise et folie.
 Tel, avec de grands biens, ne sait trouver comment
Lire, se promener, s’égayer un moment.
De madame Drabeau racontons l’infortune :
Trente mille louis composant sa fortune,
À balayer, frotter, trotter en sa maison,
Elle passe son temps. Si la peur du démon
Lui fait donner, parfois, quelque chose à l’église,
Elle refuse tout pour la noble entreprise
De son compatriote industrieux, savant.
Ce n’est pas, à l’ouir, qu’elle tienne à l’argent ;
Mais, du matin au soir, attachée à l’ouvrage,
À peine de dormir a-t-elle le courage.
Malheureuse, inquiète, on conçoit l’embarras
Où la mettent des biens dont elle n’use pas.
Si vous en avez trop, qu’une noble dépense
Vous délivre à propos de votre dépendance.
 Je pourrais rapporter vingt exemples frappants
D’avares citadins ; mais parcourons les champs :
Ce vice, dès longtems, peu satisfait des villes,
Est allé dans les champs chercher d’autres asiles.