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Page:Bibaud - Épîtres, satires, chansons, épigrammes, et autres pièces de vers, 1830.djvu/27

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Cet homme qu’il noircit court la même carrière
Que lui-même, et le laisse assez loin en arrière.
 L’ignorant, quelquefois, porte envie au savant :
La chose a même lieu de parent à parent.
Cette sorte d’envie est quelque peu rustique :
Racontons sur ce point une histoire authentique,
Et dont tous les témoins sont encore vivants.
Philomathe n’eut point de fortunés parents ;
Tout leur bien consistait en une métairie,
Même, les accidens fâcheux, la maladie,
Le sort, l’iniquité d’un père, à leur endroit,
Les réduisirent-ils encor plus à l’étroit :
Mais quoique Philomathe eut des parens peu riches,
Jamais, à son égard, il ne les trouva chiches,
Et de se plaindre d’eux jamais il n’eut sujet :
Rendre leur fils heureux était leur seul objet :
Ne pouvant lui laisser un fort gros héritage,
Ils voulurent qu’il eût le savoir en partage :
Un bon tiers de leur gain et de leur revenu
Passait pour qu’il fût bien logé, nourri, vêtu.
Mais que gagnèrent-ils ? la haine de leurs frères :
Tous les collatéraux et même les grands-pères
De ces sages parens deviennent ennemis,
Et laissent retomber leur haine sur leur fils.
Eux, pour toute réponse et pour toute vengeance,
Ils méprisent les cris de leur rustre ignorance.
 L’envieux, quelquefois, porte envie à l’habit,
Et de le porter tel vous fait presque un délit.