Page:Bibaud - Épîtres, satires, chansons, épigrammes, et autres pièces de vers, 1830.djvu/47

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 « Ont cru qu’il convenait d’entendre raillerie,
« Et n’ont, dans tes propos, vu qu’une étourderie :
« Minerve t’a laissé quelques grains de raison ;
« Les Muses, souriant comme à leur nourrisson,
« T’ont laissé parcourir les rives du Permesse,
« Et combattre assez bien l’Envie et la Paresse,
« Moi-même, j’ai prescrit, me montrant indulgent,
« À ton grave délit ce léger châtiment :
« Tu n’iras point porter, sans mon feu, sans ma grâce,
« Tes téméraires pas au sommet du Parnasse ;
« Tu resteras au bas : ainsi je l’ai voulu,
« Ainsi l’a décrété mon pouvoir absolu :
« Tu seras, en un mot, plus rimeur que poète :
« Différent de celui que ton pays regrette,
« Qui, fort du beau génie et de l’heureux talent
« Que des mains de Nature il reçut, en naissant,
« Et que je réchauffai de ma divine flamme,
« Brilla dans la chanson, l’épitre et l’épigramme,
« Y montra de l’esprit les grâces et le sel :
« N’espère point, enfin, d’être un autre Quesnel :[1]

  1. Il n’est aucun Canadien tant soit peu instruit, qui n’ait lu au moins quelques unes des productions de feu Mr. Joseph Quesnel, et qui n’y ait remarqué un vrai génie poétique. Malgré quelques négligences, quelques fautes même de versification, et peut-être à cause de ces négligences mêmes, c’est bien de cet aimable et spirituel rimeur, qu’on peut dire qu’il était né poète. Il serait bien à désirer, selon moi, que ses ouvrages, du moins ses Œuvres choisies, fussent enfin données au public, après les corrections permises à un éditeur. On y trouverait, je n’en doute point, ce qui fait lemplus grand mérite d’un livre, l’utile et l’agréable, allant de compagnie, et se prêtant la main.