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Page:Bibaud - Épîtres, satires, chansons, épigrammes, et autres pièces de vers, 1830.djvu/51

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Qui, voyant dans son mal un ordre exprès des Cieux,
Et dans les soins de l’art un grand péché contre eux,
Fuyait tout médecin, refusait tout remède.
Mais, Dieu dit : « Aide-toi, si tu veux que je t’aide
Et, se laisser mourir, quand on peut l’empêcher,
Ce n’est pas plaire au Ciel, c’est contre lui pécher.
Loin de moi, cependant, le dessein téméraire
De voir tout du même œil : l’ignorant volontaire
De l’ignorant par sort doit être distingué,
Et seul, sur son état, vertement harangué.
L’ignorant volontaire est toujours méprisable.
Pourtant, le temps n’est plus, où, chose inexplicable,
Un noble campagnard paraissait dédaigner
L’art de lire, était fier de ne savoir signer.
Mais, est-il suffisant de ne faire un droit-lige
De l’ignorance ? Non, il faut qu’on s’en afflige :
Ignorer de son choix est un tort important :
Qu’est-ce, alors, l’ignorance, ou plutôt, l’ignorant ?
L’ignorant est celui qui put, dans son enfance,
Apprendre, mais, par goût, manqua de diligence ;
Qui, pouvant être utile à ses concitoyens,
De les servir un jour négligea les moyens.
L’ignorant, quel qu’il soit, est un homme coupable,
S’il se charge d’un soin dont il n’est pas capable.
Qui croirait qu’on a vu plus d’un représentant,
Par la foule porté dans notre parlement,
Ignare jusqu’au point de ne savoir pas lire,
Et de la main d’autrui se servir pour écrire ?