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Page:Bibaud - Épîtres, satires, chansons, épigrammes, et autres pièces de vers, 1830.djvu/59

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 « M… o K…, » diras-tu, « se permettra d’écrire
« Tout ce qu’en sa cervelle enfante le délire ;
« Pourra se faire un jeu de se moquer des gens,
« De railler la vertu ; d’insulter au bon-sens ;
« Dans le style ampoulé que lui dicte la rage,
« Vomira contre tous et le fiel et l’outrage ;
« Et moi, parlant français, osé-je raisonner,
« Si l’on veut bien l’en croire, il faut m’emprisonner !
« Dans les fougueux transports où la rage le jette,
« Il lui sera permis de faire le prophète,
« Et l’on me défendra de parler du passé !
« Le mensonge sera dans sa feuille entassé ;
« Tantôt, il verra tout avec un microscope ;
« Puis, tournant le feuillet, il deviendra myope ;
« Confondra pêle-mêle et vices et vertus ;
« Encensera Néron, injuriera Brutus !..
« Témoin de tant d’horreurs, vous conviendrez, je pense,
« Qu’il faut être muet, pour garder le silence :
« Et, comme a dit quelqu’un, ne peut-on à propos,
« Confondre les pervers, et se moquer des sots ? »
Oui, sans doute, on le peut, souvent on le doit même ;[1]
Mais, en quoique ce soit, il ne faut être extrême :
L’homme de bien, toujours, tient un juste milieu ;
Donne à tout son vrai nom, met tout en son vrai lieu :
Si faire bien pour mal lui semble une loi dure,
Du moins, il ne rend pas injure pour injure :

  1. Quoi ! se moquer des sots ! non, mais confondre les pervers. On répond ici au premier hémistiche du vers précédent, sans faire attention au second.