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Page:Bibaud - Épîtres, satires, chansons, épigrammes, et autres pièces de vers, 1830.djvu/60

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Non par timidité, mais par affection,
Il recherche, avant tout, la modération ;
La modération, vertu de tout vrai sage,
Se remarque en ses goûts, ses gestes, son langage.
Un soir, à l’Odéon, un poëte français
Met, par hazard, son pied sur celui d’un laquais :
Ce dernier, courroucé, lève la main, le frappe :
L’autre, homme modéré, sans lui rendre la tape,
Lui dit. « Vous avez tort ; je ne vous voyais pas ; »
Et l’affaire finit, sans un plus grand fracas.
Que fut-il arrivé, si prompt à la colère,
Il eût d’un fort soufflet payé le téméraire ?
Que ce dernier criant, peut-être, et de nouveau,
Frappant, on les eût crus, mis au même niveau,
Honnis, bernés, sifflés, hués, mis à la porte.
Ton cas, tu m’en peux croire, est de la même sorte
Tu me dis ton rival grossier, impertinent :
Crains qu’on ne te regarde et mette au même rang.
Si cet auteur veut bien se rendre méprisable,
Faut-il absolument que tu lui sois semblable ?
Ou crois-tu que, chez lui, sifflant un mauvais goût,
Chez toi, par fantaisie, on applaudira tout ?
Garde-toi de compter sur un pareil caprice :
J’aime, dans un ami, sa vertu, hais son vice ;
Pour moi, sans m’égarer dans un sentier tordu,
Partout, le crime est crime, et la vertu, vertu.
Le parti qu’on soutient ne fait rien à la chose :
C’est, même, injurier une honorable cause,