d’apaiser la soif brûlante de nos âmes.
Je dis nos âmes, comme si elles étaient sœurs. Voyez dans la souffrance combien vite nous nous faisons d’illusions ; parce que je suis triste et cherche quelquechose qui me manque, il me semble que vous aussi vous souffrez ; vous vous demandez, ai-je une dyspepsie anticipée d’un bonheur que je n’ai pas goûté ; suis-je microbisé d’une maladie dont je me suis moquée bien souvent, serais-je une utopiste voulant marier toutes les contradictions ?
Dites-moi dans votre prochaine lettre si je me trompe. Je vois d’ici, Monsieur, combien vous me trouvez pétrie de prétentions, en comptant d’avance sur votre réponse ? je ne le pense pas. Vous aimez l’intrigue ; vous avez vu tant de choses dans vos voyages ; ma conduite ne vous surprendra pas. Si vous aimiez, je ne vous parlerais pas comme je le fais ; votre cœur et votre esprit étant occupés d’une autre, vous n’auriez aucun moment à donner à une inconnue ; étant tout pour elle, vous n’auriez pas un mot pour moi. Mais l’amour vous ne le connaissez pas. Vous ignorez ses instants d’ineffable bonheur, de joie réelle, que procure un tel sentiment lorsqu’il est partagé, et vous ne pouvez, comme Lamartine, vous écrier :