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un mythe. Il se livrerait à la sculpture, le marbre qu’il polirait, le marbre froid et dur il saurait par la seule force de son génie, de sa volonté en faire une œuvre d’inspiration sublime.

Il se mit à l’ouvrage, travailla fort, et en peu d’années réussit. À l’exposition des Arts à Paris, il obtint le premier prix pour sa statue de l’Attente. Il eut un succès monstre, on l’acclama dans un délire d’enthousiasme, les hommes l’enviaient, les femmes le couvrirent de monceaux de fleurs.

Un prix fabuleux lui fut offert pour son chef-d’œuvre, il refusa et tel qu’un mari jaloux, courut s’enfermer avec son trésor ; comme Pygmalion il se mit à aimer sa statue. Il rêva de ces yeux, de cette bouche, de cette âme qui semblait s’échapper de ses lèvres ; il entendit d’elle les paroles qu’il voulait entendre de l’être aimé, il lui sourit et vécut ainsi du rêve, assez heureux pendant quelques semaines ; mais un beau jour, malgré toute la séduction de la déesse, il trouva vides les pièces qu’il habitait. Le mal dont il avait beaucoup souffert le reprit. Il résolut de voyager, il parcourrait le monde, il la trouverait cette âme fraternelle qu’appelait son âme ; cette étoile de son ciel, ce souffle de son existence, elle existait ; mais où ? S’il ne l’avait pas rencontrée en France, pays