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n’est-ce pas assez pour tenter la fortune ? Tenez, si j’étais à votre place je m’assiérais là, j’écrirais à ma femme que je désapprouve ma conduite passée, que si elle veut bien le permettre je lui rendrai visite.

Georges hésita.

— Et Noëmie, dit-il.

— Noëmie vous oubliera, vous aussi.

Un profond soupir souleva la poitrine du marquis.

— Ma foi, dit-il, vous avez peut-être raison. Ne vaut-il pas mieux en finir de suite et connaître mon malheur tout entier. Je suis las de la vie que je mène, je sens bien qu’au fond de mon cœur doit vivre un éternel regret ; mais je n’ai pas le droit de faire partager mes chagrins à Noëmie. Qu’elle apprenne donc de suite que je ne m’appartiens pas, ainsi que vous le dites, elle m’oubliera.

Ce dernier mot s’éteignit comme un soupir, puis avec une agitation fébrile le marquis saisit une plume et se mit à écrire rapidement. Louis se promenait à grands pas dans la chambre, regardant de temps en temps le marquis avec compassion.

— Pauvre ami, disait-il, il est vraiment à plaindre, à vingt-sept ans voir son avenir brisé. Mais ne vaut-il pas mieux qu’il retourne dès à présent vers sa femme, que le diable aurait dû emporter bien avant aujourd’hui.