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et que les seigneurs de Bazeilles devaient leur surnom à leur cimier portant un moine.

Dans la nouvelle édition de Jean le Bel que nous venons de publier pour la Société de l’histoire de France, en collaboration avec M.  Déprez, nous suivîmes, sans penser à la contrôler, l’opinion émise par des érudits aussi compétents que MM.  Kervyn de Lettenhove et Luce, et, bien que Jean le Bel nomme ce chevalier « Le Moyne de Basle[1] », nous attribuâmes néanmoins à Alard de Bazeilles le rôle qu’il remplit en cette circonstance[2]. Nous aurions peut-être été exposé à répéter encore cette erreur dans la suite, si un obligeant érudit ne nous avait mis en garde. M.  le comte de Pange, qui se livre d’une manière toute particulière à l’étude de la Lorraine et des familles de ce pays, eut la complaisance de nous signaler plusieurs documents et divers travaux, prouvant, croyons-nous, d’une manière décisive que le chevalier appelé par Jean le Bel « Le Moyne de Basle » et par Froissart « Le Monne de Basle ou de Basèle[3] » appartient bien à la célèbre famille des Münch ou Moine de la ville de Bâle en Suisse[4]. Pour le démontrer, nous allons d’abord faire ressortir la contradiction existant entre l’assertion de M.  Kervyn de Lettenhove, qu’Alard de Bazeilles vivait encore en 1357, et le récit de Froissart, affirmant que le chevalier appelé Le Moine de Basle ou de Basèle fut tué à la bataille de Crécy, puis nous invoquerons le témoignage très positif de plusieurs chroniques allemandes et de documents qui nous permettront de bien mettre en relief la personne d’Henri le Moine de Bâle.

Nous avons vu que le chevalier identifié par M.  Kervyn de Lettenhove avec Le Moine de Basle, soit Alard de Bazeilles, ne mourut pas, selon lui, à la bataille de Crécy, et qu’en 1357 il siégea encore parmi les pairs de la cour plénière de Bouillon. Or,

  1. T. II, p. 101.
  2. M.  Louis Léger, dans son ouvrage : le Monde slave, études politiques et littéraires (Paris, Hachette, 1902, in-12), deuxième série, p. 12, a répété aussi l’assertion de MM.  Kervyn de Lettenhove et Luce.
  3. Nous ferons remarquer ici que Basèle ou Baselle n’est que la forme germanique de Basle. Aujourd’hui encore, en allemand, Bâle s’appelle Basel, d’où il s’ensuit que, sous ces deux formes, Froissart n’a désigné qu’une seule ville.
  4. M.  de Pange, dans son ouvrage intitulé : le Patriotisme français en Lorraine antérieurement à Jeanne d’Arc (Paris, Champion, 1889, in-8o), p. 65 et 66, en note, a déjà conclu en faveur de Henri Le Moine de Bâle.