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ET CRITIQUE

P. 10, l. 27. — par cœur. La source de cette addition est dans la préface posthume de la Franciade : « Il ne faut s’esmerveiller si j’estime Virgile plus excellent et plus rond, plus serré et plus parfait que tous les autres, soit que des ma jeunesse mon regent me le lisoit à l’escole, soit que depuis je me sois fait une idée de ses conceptions en mon esprit (portant tousjours son livre en la main), ou soit que, l’ayant appris par cœur des mon enfance, je ne le puisse oublier. » (Bl, III, 23.)

P. 10, l. 45. — destourner. Cette incise de B vient de la préface posthume de la Franciade : « ... et mille autres ecstatiques descriptions que tu liras en un si divin autheur (Virgile), lesquelles te feront poëte... et t’irriteront les naïfves et naturelles scintilles de l’ame que dés la naissance tu as receues, t’inclinant plustost à ce mestier qu’à celuy-là : car tout homme dés le naistre reçoit en l’ame je ne sçay quelles fatales impressions qui le contraignent suivre plustost son destin que sa volonté. » (Bl., III, 17.)

P. 11, l. 2. — Carnavalet. François de Carnavalet, de son vrai nom Kernovenoy, était Breton. Né vers 1520, il mourut à Paris en 1571. En 1549, il avait les fonctions de « premier écuyer de Henri II ». Aussi dans l’ode pindarique Ma promesse ne veut pas, publiée en janv. 1550, Ronsard l’a-t-il vanté comme habile cavalier et professeur des pages aux Ecuries royales, qu’il avait mission de former à tous les points de vue comme le pédotribe antique (Bl., II, 57). Dans l’Hymne de France, qui est de 1549, il exalte également ses mérites d’écuyer (Bl., V, 286). D’après une note de Richelet, reproduite par Blanchemain, à l’épode I de l’ode pindarique, Carnavalet aurait été alors gouverneur du futur Charles IX ; or le futur Charles IX n’était pas encore né (il naquit en juin 1550). Carnavalet n’était pas non plus gouverneur du dauphin, le futur Francois II, car nous savons par Ronsard lui-même que Catherine de Méd. avait confié son fils aîné aux soins de D’Urfé (Bl., II, 179). Les élèves de Carnavalet dont il s’agit dans cette ode sont donc simplement les pages et les jeunes écuyers de l’Ecurie Royale, qui était alors, comme dit Binet, « une escole de tous honestes et vertueux exercices ». — C’est seulement quelques années plus tard que Carnavalet fut nommé gouverneur du troisième fils de Henri II, le futur Henri III (né en sept. 1551, d’abord duc d’Angoulême, puis duc d’Orléans, puis duc d’Anjou) ; ainsi nous le présentent deux sonnets de Ronsard (Bl., V, 345 ; M.-L., VI, 417), dont le premier est adressé en 1565 et 1567 A Monsieur de Car. gouverneur de Monseigneur d’Orleans, en 1571 et 1573 A M. de Carnavalet gouverneur de Monseigneur d’Anjou, en 1578, 1584 et 1587 À M. de Carnavalet gouverneur du Roy Henry III. — D’après une pièce de Dorat, citée par Marty-Laveaux, c’est vraisemblablement sur la recommandation de Carnavalet que Dorat fut choisi pour enseigner le grec et le latin aux filles de Henri II et à leur demi-frère, le bâtard d’Angoulême, pendant un an, vers la fin du règne de Henri II (éd. des Œuvres de Dorat, Notice, pp. xix-xxi, et Appendice, lvi) ; c’est à lui encore que Dorat dut de conserver sa maison de Limoges pendant la guerre civile de 1569 (Ibid., Notice, p xxix, et Appendice, p lx). — Enfin J. Velliard cite Carnavalet parmi les protecteurs de Ronsard contre les poètes courtisans de 1550 à 1553 (V. ci-après p. 139, dern. ligne).