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Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/152

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Je deviens moins timide, et, cédant au désir D’apprendre ce qui doit me suivre.

Je veux savoir enfin si j’ai l’espoir de vivre Quelques moments dans l’avenir.

J’en crains révénement, j’en cherche le présage ;

Et dans ce beau projet, dussiez-vous y périr, filuse, vous m’entraînez et vous voulez courir!

Partez donc, Musc, et du naufrage Puisse un ciel pur vous préserver!

De maint et maint écueil puisse-t-il vous sauver!

Que de votre nacelle il écarte l’orage!

El nvoi, loin de prétendre encore à vos faveurs.

Malgré vous je veux être sage.

Oui, je veux renoncer à cueillir quelques fleurs Dont rien ne peut, hélas! rajeunir les couleurs.

On vous suit trop longtemps, c’est un commun usage.

Muse vieille est encor volage :

Elle fuit, reparaît, prodigue ses douceurs.

On la crut trop jadis, on la croit davantage :

Ce penchant augmente avec l’âge.

Vainement la vieillesse est là ;

Toujours fidèle à sa folie.

Quiconque écrivit écrira.

Mais ce n’est plus qu’une manie,

Une habitude du cerveau ;

Et puis sans fin la plume trotte :

Rien à rayer, tout parait beau ;

On s’abandonne à sa marotte.

Àh ! que de vers on fait lorsqu’en vers on radote! Pauvre Muse, pour vous je crains bien ce travers !

Et je ne sais pas trop si je le dis en vers ;

Car enfin, avouons la chose,

On finit par rimer en prose.

Croyez-en mes conseils, le public est malin :

Dérobons-lui notre déclin.

Peut-être il vous aima, mais il n’a nulle envie Des fruits vains et tardifs de votre fantaisie.

Que pour nous désormais les vers ne soient qu’un jeu Dont il n’ait point la confidence :

De talent cela nous dispense,

Et nous n’en ferons pas pour peu !

Puis, je me garderai d’un indiscret aveu ;

Trop heureuse, entre nous, de pouvoir en silence