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remporté le grand prix de 100,000 francs décerné pour un assortiment complet de machines, qu’il avait présenté au concours ouvert par le gouvernement impérial. Peu de temps après, plusieurs distinctions du même genre lui échurent en partage, tant à Gand qu’à Paris. Loin de dérober ses inventions à la lumière et d’en faire l’objet d’un monopole lucratif, Bauwens voulut les populariser et déposa, à cet effet, au Musée des Arts, à Paris, une de ces mécaniques, appelées Mull-Jenny, que tout le monde pouvait aller examiner et imiter au besoin.

Vers l’an 1805, il fonda une troisième filature de coton dans l’enclos de l’ancienne abbaye des Norbertins, à Tronchiennes, près de Gand. En même temps, il introduisait, le premier en France, l’emploi de la navette volante et des machines à vapeur appliquées aux manufactures. Il essaya l’impression sur étoffe de coton, tentative qui fut exploitée contre lui et donna lieu à un procès qu’il perdit. Pendant sa direction à la maison de force de Gand, on fit un essai pour y filer le lin à la mécanique. On trouvera des détails intéressants sur les différentes innovations de notre industriel, dans l’ouvrage de Van Hoobrouck de Mooreghem, intitulé : Exposition des produits de l’industrie du département de l’Escaut, réunis à la mairie de Gand, à l’occasion du passage du premier consul en cette ville, en messidor an XI. Gand, Stéven, in-8o.

On le voit, aucun genre d’industrie n’échappait aux vues de ce génie entreprenant. Aussi, l’influence qu’il exerça sur la prospérité publique, doit-elle le faire classer parmi les hommes les plus utiles des temps modernes.

Chef d’une famille nombreuse et active, Bauwens fut aidé dans ses vastes entreprises par ses quatre frères et par les époux de ses sœurs. Aussi serait-il injuste de ne pas associer sa famille à une partie de sa gloire, comme elle le fut à sa fortune et à ses travaux. François, Pierre, Jean et Charles Bauwens, et ses beaux-frères le baron de Furth, Devos, De Smet, Heyndricx et De Pauw, furent les collaborateurs et les continuateurs de ses entreprises. Du reste cet hommage leur a été rendu dans le Rapport à l’Institut national d’un voyage fait à la fin de l’an X dans les départements réunis, par le citoyen Camus (Paris, an XI, in-4o, pp. 14 et 32).

Tant d’efforts persistants pour transformer la routine des anciennes industries et en introduire de nouvelles, ne devaient point rester sans récompense publique. À la suite d’un rapport des plus honorables, fait par M. Vanderhaegen-Vander Cruyssen, au nom d’une commission chargée de l’examen des objets relatifs aux fabriques, une médaille d’or fut remise, le 22 mai 1805, par M. Dellafaille, maire de Gand, comme témoignage de gratitude, à Liévin Bauwens, qui était alors membre du conseil général du département de l’Escaut. L’inscription de la médaille constatait qu’elle lui était décernée pour avoir ouvert de nouvelles sources à l’industrie de ses concitoyens. Ces manifestations publiques de reconnaissance sont trop rares et font assez d’honneur aux corps constitués dont elles émanent pour les omettre dans la biographie de l’homme remarquable qui en fut l’objet[1]. Le conseil municipal de

  1. Voici ce rapport, communiqué à la séance du conseil municipal de Gand, le 27 pluviôse an XIII :

    « La commission que vous avez nommée pour examiner l’état financier de la ville pendant l’an douze et vous en rendre compte, connaissant combien vous avez à cœur de donner tous vos soins à ce qui peut tendre à augmenter les moyens de prospérité et de splendeur de la ville dont vous êtes les organes et les protecteurs, sachant d’ailleurs qu’il entre dans les attributions de cette commission de vous présenter des vues sur tous les objets d’utilité publique que la commission peut croire propres et tendre à relever l’ancienne magnificence de la grande ville que le conseil municipal est appelé à représenter, s’est pénétrée de ses devoirs et a reconnu que dans une ville aussi commerçante et manufacturière que Gand, tous les soins et toutes les veilles des administrateurs doivent concourir à l’encouragement du commerce, source première de toutes les richesses, et spécialement de celui qui consiste en fabriques et manufactures ; qu’entre les moyens d’encouragement qui sont au pouvoir des administrateurs de la ville, un des plus puissants et des plus efficaces est d’honorer la profession de commerçant dans toutes les occasions, et de témoigner constamment à ces utiles et respectables citoyens, combien la ville leur sait gré de la prospérité et de la splendeur qu’ils répandent dans son sein.

    « Il résulte de ces principes, Messieurs, que lors-