les rues de cette ville, le 4 août de la même année. Les chroniqueurs le dépeignent comme un homme instruit, un preux chevalier, et en même temps, malgré son nom aristocratique, comme un chaleureux ami du peuple. Il crut pouvoir aspirer à la dignité épiscopale en 1303, après la mort d’Adolphe de Waldeck ; mais les suffrages, quelque temps balancés entre lui et les deux frères Richard et Gérard de Hornes, se portèrent finalement sur Guillaume d’Artois, qui déclina l’honneur qu’on voulait lui faire. Alors le chapitre, un peu à la légère, se prononça en faveur du chanoine Thibaut, frère du comte de Bar. Ce choix, ratifié immédiatement par le pape Boniface VIII, releva les espérances du parti noble, et ne contribua pas médiocrement à perpétuer l’anarchie qui avait désolé la cité pendant le dernier règne.
En 1302, pour contenir le flot populaire, les échevins avaient consenti à signer un traité en vertu duquel le conseil ne pourrait désormais, sans le consentement des métiers, ni établir des taxes, ni engager les revenus publics, ni lever des milices, ni accorder au prince des dons gratuits. Mais le parti, qui se voyait ainsi forcé dans ses retranchements, n’attendait qu’un moment propice pour revenir sur des concessions arrachées par la violence. Le nouvel évêque fut circonvenu et se montra d’autant plus disposé à écouter les doléances des échevins, qu’elles étaient appuyées d’une assez forte somme d’argent. A l’intention formelle qu’il mani- festa de retirer les quatre articles, les chanoines répondirent par un refus net, et engagèrent même le peuple à ne point céder. L’exaspération fut telle dans les masses, que le prince, suivi des échevins et des Grands, jugea prudent de se retirer à Maestricht. Là, il n’eut rien de plus pressé que de rassembler des troupes et de se préparer à marcher sur sa capitale. Se rangeant à l’opinion des échevins, qui alléguaient l’exemple de Henri de Gueldre, il résolut de tenir un plaid à Vottem, pour y juger les rebelles. Il s’y rendit effectivement au jour fixé (19 août 1305), accompagné du duc de Lorraine et du comte de Bar, et suivi d’une nombreuse chevalerie. Mais les gens de la commune, prévenus à temps, l’avaient devancé. Ils se tenaient en armes et en bon ordre auprès du perron que Thibaut lui-même avait fait dresser pour la circonstance. Arnould de Blankenheim était à leur tête, bien décidé, comme eux, à défendre le maintien des franchises et des fraternités. Cette attitude intimida l’évêque ; la paix fut décidée séance tenante, puis scellée à Seraing le 20 août 1307. Les échevins murmurèrent ; mais il fallut se soumettre. Les Petits gagnèrent encore du terrain en 1312 ; ils parvinrent à faire décider que l’administration de la cité appartiendrait, à l’avenir, exclusivement aux maîtres, aux jurés et aux bourgeois.
Thibaut de Bar étant mort en Italie, le 13 mai 1312, il y eut lieu de pourvoir, pour la durée de l’interrègne, à l’élection d’un mambour. Les échevins et les nobles soutinrent que, cet office devant être essentiellement confié à un homme de guerre, il était juste qu’ils intervinssent dans la nomination du titulaire (quòd quia defensio patriæ ipsis incumberet, ducis eorum, mamburni scilicet qui ducit ad bella, electioni interesse deberent). Les chanoines répliquèrent assez aigrement que, puisqu’ils avaient le droit de choisir l’évêque, ils avaient à plus forte raison celui de choisir son représentant. Ils proclamèrent donc mambour Arnould de Blankenheim, au grand contentement des bourgeois, mais au grand dépit de ses adversaires.
L’élu du chapitre était homme à faire respecter son autorité. Il n’hésita pas un instant à faire raser la tour de Hardoumont (château de Hollogne-sur-Geer), refuge de quelques chevaliers du lignage de Waroux, qui avaient violé la quarantaine et ravagé les terres des Awans. Trois des coupables furent même décapités. Les Waroux en conçurent un mortel ressentiment. Ils firent cause commune avec les échevins et les nobles de la cité, et dans une réunion qui eut lieu à Huy, poussèrent ceux-ci à déclarer non valable l’élection de Blankenheim, et à décerner la mambournie au comte de