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VOYAGE D′UNE FEMME

large. La grande Thompson, rivière rapide et brillante, pleine de truites et formée quelques milles plus haut, par les neiges du Long’s-Peak, fait de magiques détours, disparaît pour reparaître alors qu’on s’y attend le moins, éclate parmi les pelouses, saute dans les ravins romantiques et fait partout entendre son murmure dans le silence des longues nuits. Ici et là, les pelouses sont si douces, les arbres si bien groupés, un lac compose un premier plan tellement artistique, ou bien une cascade tombe avec tant de sentiment du pittoresque, que j’en veux presque à la nature d’imiter l’art de si près. Mais cent yards plus loin, splendide, inimitable, inaccessible, elle redevient elle-même et contraint la pensée de s’élever vers son Créateur et le nôtre. La physionomie d’Estes-Park n’est pas la douceur, c’est la grandeur et le sublime. La partie inférieure du parc est à une altitude de 7, 500  pieds, et quoique pendant la journée le soleil soit chaud, le mercure s’arrête près du point de congélation pendant toutes les nuits d’été. Il tombe une immense quantité de neige ; mais on doit en partie, aux vents violents qui la chassent dans les vallées profondes et au soleil chaud et brillant des mois d’hiver, que le parc ne soit jamais bloqué, et beaucoup de bétail et de chevaux passent cette saison dehors sur des gazons sucrés que le soleil conserve et dont l’espèce dite gramma est la plus appréciée. Ici comme ailleurs, dans le voisinage, la terre est presque partout mauvaise ; poussière grise, granitique, produite probablement par la désagrégation des montagnes environnantes. Elle ne retient pas l’eau et n’est