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Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/162

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gnarde, doucereuse. L’autre diable chante à pleine voix, sans que jamais lui vienne en tête que quelqu’un peut l’écouter. Vous pouvez triompher : sans la connaissance du grec il n’y a pas d’instruction. Mais quelle connaissance ? Comment l’acquérir ? Pourquoi est-elle nécessaire ? Pour toutes ces questions j’ai des réponses claires comme le jour. »

Tolstoï eut l’occasion de montrer, comme il le désirait, « son tour de force ». C’est S. A. Bers qui nous le raconte dans ses souvenirs sur Tolstoï.

« Après qu’il eut terminé Guerre et Paix, Léon Nicolaievitch voulut étudier le grec classique. Je sais qu’il étudia la langue et apprit les œuvres d’Hérodote, en trois mois, sans aucune connaissance préalable de la langue. Étant alors de passage à Moscou, il alla voir le défunt professeur du lycée, Léontiev, afin de causer avec lui de la littérature grecque. Léontiev ne voulait point croire qu’il eût appris si rapidement le grec antique, et lui demanda de lui lire quelque chose à livre ouvert. En trois passages différents ils se trouvèrent en désaccord pour la traduction ; et après discussion, le professeur dut reconnaître que Tolstoï avait raison[1]. »

Ce labeur excessif ne tarda pas à ébranler sa santé, et sans doute y avait-il aussi d’autres causes. En juin 1871, il écrit à Fet :

« Je ne vous ai pas écrit depuis longtemps et ne suis pas venu chez vous parce que j’étais et suis malade. Je ne sais pas moi-même de quoi, mais cela ressemble à quelque chose de mauvais ou bon, selon

  1. Souvenirs sur Tolstoï, p. 51.