Aller au contenu

Page:Bishop - En canot de papier de Québec au golfe du Mexique, traduction Hephell, Plon, 1879.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
182
EN CANOT DE PAPIER.

passe. Les bas-fonds situés entre les îles marécageuses du New-River sont couverts de bancs d’huîtres que le canot frôlait quand je traversai l’étroite entrée du Stump-Sound. En tournant une pointe de terre, je vis, dans un bouquet d’arbres, bien à couvert, la cabane d’un pêcheur d’huîtres, le capitaine Risley-Lewis, qui m’informa que son habitation était la seule qu’on pût trouver dans le voisinage, et il m’invita à devenir son hôte. Le lendemain mit ma patience et mes muscles à une rude épreuve. La quantité de chenaux étroits qui, comme une toile d’araignée, s’étendent dans les marais et forment çà et là de nombreuses petites lagunes, rendait ma navigation des plus difficiles. Je me perdis à diverses reprises, et mon canot monta encore sur des bancs d’huîtres dans des eaux peu profondes, dont les fonds vaseux n’auraient pas pu supporter le poids de ma personne si j’avais essayé de sauter par-dessus le bord pour alléger la petite embarcation.

Je traversai le lac Alligator, large de deux milles, sans apercevoir un seul alligator. Le voyageur qui fait la route du sud commence seulement à rencontrer ces reptiles près du Neuse-River, par la latitude du Pamplico-Sound. Pendant les mois d’hiver, ils se cachent dans les fonds vaseux des ruisseaux et des lagunes. Tous les noirs et tous les blancs du Sud disent que lorsque l’on prend ces grands sauriens dans leur retraite d’hiver, il n’est pas rare de trouver dans leur estomac un tronc de sapin ; mais ils ne sauraient expliquer pourquoi le monstre l’a avalé.

Sur une étendue de douze milles de sinueux détours,