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EN CANOT DE PAPIER.

meurait autrefois dans une très-confortable maison. Le débarcadère Clay, pendant la guerre civile, a servi de dépôt aux marchandises qui avaient à franchir le blocus. Archer, station du chemin de fer, n’est éloigné que de vingt milles, et les importations de contrebande étaient amenées jusque-là par des attelages de mules, après avoir été débarquées des navires qui avaient été assez heureux pour forcer le blocus.

Comme le soleil descendait à l’horizon et que les ombres des arbres devenaient longues sur les eaux du fleuve, nous sentîmes l’air salé des brises du golfe du Mexique, transportées jusqu’à nous par-dessus les forêts. Dès que l’obscurité eut jeté sur nous le sombre manteau de la nuit, nous laissâmes à gauche l’entrée de la passe est, et nos bateaux furent lancés sur le jusant rapide de la large passe ouest jusque dans les grands marais de la côte.

Une heure plus tard, nous émergions de la sombre forêt dans les plates savanes. La fraîcheur de l’air marin était délicieuse. Les étoiles brillaient d’un doux éclat, et le murmure des flots, l’appel du héron ou le cri du canard effrayé par notre marche et les sauts que le poisson faisait hors de l’eau étaient les seuls bruits que nous pussions entendre dans la nature. On eût dit que nous entrions dans un autre monde.

Au milieu des terrains bas, près de l’embouchure du fleuve, il semblait qu’il n’y avait qu’un seul point au-dessus du niveau de la marée. C’était un petit bouquet d’arbres appelé l’île Bradford, qui s’élevait comme une oasis dans le désert. Les flots côtoyaient rapidement ses