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XXXII
PRÉFACE


dehors de la Gascogne, des conteurs de grand style, dont les récits pouvaient, sans faiblir, supporter la comparaison avec les textes que je dois à mes fournisseurs les plus recommandables, par exemple à Pauline Lacaze, de Panassac (Gers), et même à feu Cazaux, de Lectoure (Gers). Ces narrations, d’une si fière tournure, je les ai retrouvées plus tard, identiques pour le fond, dans certains recueils provinciaux. Par malheur, l’inadmissible souvenir de la belle forme orale, contrastait cruellement avec la faiblesse et la pâleur du texte imprimé. De là j’ai conclu que, pour les contes, le grand style est beaucoup moins rare que certains ne semblent le croire. C’est pourquoi j’estime que les bons collecteurs demeurent rigoureusement tenus de bien choisir, tant pour la forme que pour le fond, et de n’accorder qu’à bon escient leurs définitives préférences.

Cette fixité de souvenirs, cette propriété habituelle, et au besoin cette élévation du langage, m’ont plus particulièrement frappé chez certains de mes narrateurs.

Marianne Bense, du Passage-d’Agen (Lot-et-Garonne), a maintenant dépassé soixante-quinze ans. C’est une femme encore alerte, qui, pendant dix-sept ans, a servi mon oncle, l’abbé Bladé, curé du Pergain-Taillac (Gers). Les facultés de Marianne n’ont pas faibli. Mais pas de distinction native. Partant, ni grâce, ni haute mysticité personnelles. De ce double chef, elle doit absolument tout à la netteté de ses sou-