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Page:Bladé - Contes populaires de la Gascogne, t. 3, 1886.djvu/390

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DIVERS

placés, au bout de la cordelette, par une paire de vieilles formes en chêne, dures comme des cailloux, puantes comme des charognes,

— « Gueusard ! Voilà pour t’apprendre à trinquer sans nous avec le bourgeois. »

Sans se méfier de rien, le braconnier, gai comme un merle, reprit son panier, et courut chez l’avocat.

— « Ah ! Té voilà, mon ami[1], lui cria le chicaneur.

Qu’est-cé qué tu diriais,
Si jé té disiais
Que tu as gagné toun procès ?
— Et bous, moussu l’aboucat,
Qu’est-cé qué bous diriais.
Si je vous foutiais…
Une paire de perdreaux à la figure.
— Fais, mon ami, fais. Tu en as lé drroit. »

Croyant toujours porter ses perdreaux, le braconnier saisit sa cordelette, lança de toute sa

  1. Ici le narrateur imite le français, avec un accent plus particulièrement remarquable chez les vieux Gascons. Naturellement, l’avocat parle le français. Son client veut en faire autant. Sa dernière phrase, que j’ai dû traduire, se dit en gascon : « Un pareil de perdigails pous potz, une paire de perdreaux à la figure. » Par un mouvement ce familiarité reconnaissante, encore usité dans mon pays, le braconnier voulait chatouiller, avec son gibier, le visage de l’avocat.