Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/67

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contre la porte vitrée, le visage altéré les yeux pleins de larmes, et, tout près, madame de Feuchères assise, paraissant prêter l’oreille aux consolations de M. Bonnie et étendant la main vers ceux qui entraient. Manoury s’avance alors vers l’aumônier, l’entraîne dans la chambre mortuaire et lui dit en lui montrant le corps : Voilà Monseigneur !

Le duc de Bourbon était attache à l’espagnolette de la croisée du nord, par deux mouchoirs passés l’un dans l’autre le premier formant un anneau aplati et allongé, le second un ovale dont la base supportait la mâchoire inférieure et qui avait son sommet derrière la tête, sur le haut. Le mouchoir de compression ne faisait pas nœud coulant ; il ne pressait pas la trachée artère, laissait la nuque à découvert, et se trouvait tellement lâche qu’entre ses plis et la tête quelques-uns des assistants purent aisément passer les doigts. La tête du mort penchait sur sa poitrine, son visage était pâle. La langue ne sortait pas de la bouche et poussait seulement les lèvres ; les mains étaient fermées, les genoux ployés ; et, par leur extrémité, les pieds portaient sur le tapis ; de sorte que, dans les souffrances aiguës qui naissent des derniers efforts de la vie, le prince n’aurait eu, pour échapper à la mort, qu’à se dresser sur les pieds en s’appuyant contre les volets de la fenêtre. Cette disposition et ces apparences du corps combattaient puissamment l’hypothèse du suicide. Elles frappèrent de surprise la plupart des assistants.

Vinrent les autorités : le maire de St.-Leu, d’abord, qui fit constater l’état du corps ; ensuite, le juge de paix d’Enghien, qui le fit détacher et transporter