Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/131

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religieux de l’humanité avait compris trois états généraux : le fétichisme, dans lequel l’homme déifie la nature en chacune de ses productions visibles ; le polythéisme, dans lequel l’homme s’élève à des abstractions qu’il déifie ; le monothéisme, dans lequel il rapporte toute la création à une seule cause, extérieure à l’univers. Ils reconnurent dans la succession de ces trois états généraux la preuve d’un progrès facile à constater. Car dans le fétichisme, la crainte est à peu près le seul sentiment qui unisse l’homme à la divinité, telle qu’il la conçoit. Dans le polythéisme, l’amour vient se mêler à la crainte, quoique, dans cet état religieux, le type du juste soit encore celui que l’on peint comme craignant les dieux. Dans le monothéisme, enfin, dont le judaïsme et le christianisme forment les deux phases, l’amour tend de plus en plus à l’emporter sur la crainte dans les sentiments de l’homme à l’égard de la divinité. Le progrès de l’idée religieuse n’est pas moins sensible, sous le rapport de sa valeur sociale. Car, après le fétichisme, qui correspond au culte isolé de la famille, vient le polythéisme, qui ne consacre que le culte de la cité ; et, après le monothéisme des Juifs, qui ne proclame l’unité de Dieu qu’en ajoutant ceci : « Dieu a élu un seul peuple », vient le monothéisme des chrétiens, qui proclame tout à la fois et l’unité de Dieu et l’unité de la famille humaine.

De là Bazard et Enfantin concluaient également que malgré le scepticisme dont ils étaient entourés, maladie accidentelle dont il n’y avait pas lieu de s’étonner dans une époque critique, l’humanité